Dégâts en Haïti : la France doit payer sa dette
Sur les médias sociaux, certains utilisateurs Facebook relancent le débat sur l’idée que la France devrait rembourser à Haïti les 21 milliards de dollars que l’ancien pays colonisé avait payés pour obtenir son indépendance.
Deux semaines après le passage dévastateur de l’ouragan Matthew sur Haïti, beaucoup estiment sur les médias sociaux qu’il est temps pour la France de rembourser sa dette au pays.
L’ouragan a frappé plusieurs régions d’Haïti, provoquant une très grande crise humanitaire depuis le séisme de 2010. Selon le dernier bilan provisoire de la Direction de la protection civile, 546 personnes sont décédées jusqu’à ce jour.
Au lendemain de la catastrophe, le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires a lancé un appel éclair pour réunir 119 800 000 dollars en financement d’urgence.
Mais l’impact de l’ouragan conduit également de nombreuses personnes à se demander si la France ne devrait pas fournir une assistance financière en remboursant finalement ses réparations coloniales à Haïti.[]
Pour l’utilisateur de Facebook Mandy Dalton : « L’ouragan et le tremblement de terre ne sont pas les pires catastrophes qui se sont produites en Haïti. La pire catastrophe était d’origine humaine. Haïti est toujours aux prises avec les conséquences d’une dette qu’elle n’aurait jamais dû payer. »
Leondra Saintil ajoute pour sa part : « Ça fend le coeur cet ouragan qui frappe Haïti. Mais vous savez ce qui pourrait aider ? Que la France rembourse les 21 milliards de dollars de réparations qu’elle doit. »
UNE PÉTITION SIGNÉE
Si Haïti est aujourd’hui connu comme le pays le plus pauvre de l’hémisphère occidental, elle a naguère été la possession la plus rentable de l’Empire français.
Haïti a déclaré son indépendance en 1804, après avoir réussi une insurrection anti-esclavagiste et anticoloniale pour devenir le premier pays de l’époque moderne à abolir officiellement l’esclavage. Mais elle a payé un lourd tribut pour sa liberté – 150 millions de francs or, ultérieurement réduits à 90 millions de francs or – pour compenser les colons français et les propriétaires d’esclaves pour leurs plantations perdues.
C’était une somme colossale, et ça a paralysé le pays. En fait, il a fallu attendre 1947 pour qu’Haïti achève le remboursement. En 2003, l’ancien président haïtien Jean-Bertrand Aristide a estimé que la « dette de l’indépendance » , comme il est convenu de l’appeler, valait l’équivalent actuel d’environ 21 milliards de dollars, y compris les intérêts. D’autres personnes ont estimé la somme plus proche de 17 milliards de dollars.[]
Par ailleurs, après le séisme dévastateur de 2010, 100 artistes et chercheurs avaient signé une pétition pour tenter de forcer la France à rembourser ce montant « à titre de réparation pour une injustice de 200 ans » . À l’époque, la France avait rejeté cette demande.
Puis, en mai 2015, la question a de nouveau attiré l’attention internationale lorsque le président français François Hollande a déclaré en Guadeloupe : « Quand je viendrai en Haïti, j’acquitterai à mon tour la dette que nous avons. »
Ses collaborateurs avaient insisté plus tard pour dire qu’il faisait référence à la dette morale, plutôt qu’à une obligation financière.
Dans la visite qui a suivi en Haïti, le président de la République française a tenté de contourner le problème en disant au pays : « Vous ne demandez pas d’aide, vous voulez le développement. »
Cet échange a conduit à une vague d’articles invitant la France à compenser finalement Haïti en remboursant ce qu’elle devait.
Mais depuis l’ouragan, de nombreux internautes recommencent à publier des articles en disant que le moment était venu de réexaminer la question.[]
TOURISME – 10% des infrastructures affectées
Bien que son passage ait été fatal pour les hôtels dans le Sud du pays, l’ouragan Matthew n’a touché que 10% des infrastructures touristiques du pays, d’après une note du ministère du Tourisme, de concert avec l’Association touristique d’Haïti (ATH) et du Réseau national de promoteurs du tourisme solidaire (Renaprots).
« 90% des infrastructures touristiques restent intactes » , lit-on dans cette note du ministère du Tourisme, de l’ATH et du Renaprots. Autrement dit, l’impact de l’ouragan Matthew sur le secteur touristique ne peut nullement provoquer une paralysie des activités touristiques dans le pays, selon les signataires de la note.
« Les aéroports internationaux de Port-au-Prince et du Cap-Haïtien ont été réouverts et sont pleinement opérationnels, depuis le 5 octobre » , constatent le ministère et les deux associations oeuvrant dans le secteur touristique, soulignant que toutes les compagnies aériennes ont repris leurs vols réguliers de New York, Miami, Fort Lauderdale, Atlanta, Paris, Pointe-à-Pitre, Providenciales, Panama, Montréal, Santiago de Cuba, La Havane, Saint-Domingue, Curaçao, Saint-Martin, etc.
Dans la note, le ministère du Tourisme, l’ATH et Renaprots invitent les touristes à venir visiter le pays afin de découvrir la culture, la cuisine, l’art, l’artisanat et les attractions historiques. « Venez en Haïti. C’est une façon positive et constructive de soutenir l’économie haïtienne car le tourisme crée des emplois durables. »